The Nobody de Jeff Lemire

L’homme invisible chez les invisibles

The Nobody est l’un des premiers récits de Jeff Lemire, c’est une variation sur le thème de l’homme invisible. Autant dire qu’entre ce comics et le film The Invisible Man, avec Elizabeth Moss, le thème est porteur ces derniers temps.

Dès les premières pages, les habitués à Jeff Lemire seront en terrain connu. Un individu étrange arrive dans une petite bourgade de la campagne nord-américaine. Comme dans tout récit fantastique, cette figure étrange va surtout servir de révélateur aux problématiques de cette petite ville.

Dans une petite bourgade

Le récit est donc porté par cette ville, ses habitants et l’homme invisible au milieu, rompant la monotonie quotidienne. C’est un récit calme, posé et qui transpire de tout ce qui fera l’œuvre de son auteur. Contrairement à bon nombre d’œuvres de jeunesse, il n’y a pas de problème de profondeur. Tout est déjà très carré et très bien construit. Les quatre chapitres du récit sont portés par des twists et de l’approfondissement. Le portrait fait de l’homme devenu invisible s’il est classique respecte justement le récit de H.G. Wells. On y découvre parcimonieusement son passé et comment il s’est transformé.

Mélancolie douce-amère

Cela contribue donc à densifier le récit, par petites touches, surtout lorsqu’il tisse une relation avec cette jeune fille. Allant au-delà de la peur et de la paranoïa, elle va aller le découvrir, ce qui lui permettra de sortir des schémas de pensée de sa communauté. Sans jamais forcer le trait, le scénariste va utiliser l’homme invisible pour créer un récit d’émancipation sur une jeune fille, en mal-être intérieur. La douceur de son trait et de sa colorisation renforce cette ambiance douce-amère. C’est une ville où tout le monde cache des secrets mais surtout une communauté qui vit en vase-clos, bloquant face aux étrangers, qui deviennent source d’inquiétude.

Ainsi, Jeff Lemire plonge son homme invisible dans une communauté invisible. Au centre, une jeune fille qui veut, au contraire, être vue et remarquée. C’est toute cette configuration qu’il va utiliser pour développer un récit qui finalement fait mouche et nous reste dans la tête.

Bref, The Nobody est une variation sur l’homme invisible parfaitement ancrée dans les thèmes de Jeff Lemire. Construit en forme de récit d’émancipation, il interroge les peurs suscités par l’étranger de manière douce et subtile.

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